Un antécédent d’angoisse de séparation dans l’enfance comporte un risque accru d’éprouver d’autres troubles notamment anxieux à l’âge adulte.
La terreur de la perte
Les enfants souffrant d’une angoisse de séparation expriment souvent la peur d’être perdus et de ne jamais revoir leurs parents. Ils sont malheureux quand ils voyagent par eux-mêmes, qu’ils sont loin de la maison. Ils peuvent refuser de partir en camp de vacances, ou d’aller à l’école, aller chercher le pain à la boulangerie à deux pas est impossible, jusqu’à être incapables de rester seuls dans une pièce. De vrais « pots de colle », ils suivent leurs parents comme leur ombre. Le coucher est une épreuve de force, ils exigent la présence d’un ou des parents pour veilleur sur leur endormissement, parfois certains se réveillent la nuit et se réfugient dans le lit parental. Leurs rêves indiquent leur terreur : qu’il arrive un drame à leurs parents. Les ruminations et les préoccupations morbides sont constantes, l’enfant a des pensées obsédantes concernant l’intégrité de la famille et aussi la sienne : peur qu’on le kidnappe ou d’être hospitalisé, par exemple. Des somatisations, comme les céphalées, maux de ventre, vomissements, peuvent survenir pendant et en amont d’une situation de séparation. Des pics de fréquence de l’angoisse sont observés à 6 ans et à 11 ans, correspondant à l’entrée à l’école primaire et au collège.
L’angoisse comme langage familial
Chez le nourrisson, l’angoisse de séparation se manifeste par le cri qu’il émet lors du départ de sa mère par exemple, afin de signaler son sentiment de perte. Vers 18 mois, l’enfant commence à développer la compréhension que si on s’absente, ce n’est pas pour toujours. Mais parfois l’angoisse se prolonge dans l’âge. L’enfant peut avoir beaucoup de mal à se séparer de ses parents, souvent parce que les relations sont très proches ou que les parents manifestent eux-mêmes une angoisse de séparation ou des peurs multiples amenant à surprotéger l’enfant. Se basant sur le mode de faire du parent anxieux, l’observant manifester son angoisse dans certaines situations, il adoptera et reproduira cette façon d’être et de faire. On peut parler alors de l’angoisse comme langage familial à partir duquel les membres du système communiquent entre eux et renforcent mutuellement leurs symptômes, pouvant entraîner chez l’enfant de réelles difficultés à devenir autonome. Des traumatismes peuvent également expliquer l’angoisse de séparation chez l’enfant : les déménagements, la maladie ou le décès d’un membre de la famille, l’éloignement d’amis, la perte d’un animal de compagnie.
Des adultes toujours enfants
Devenus adultes, ces grands enfants anxieux éprouveront des difficultés à faire face aux situations nouvelles (changement de travail, déménagement dans une autre ville, un autre pays, etc). Ils pourront être très inquiets pour leurs enfants, jusqu’à les limiter dans leur autonomisation et leur développement social, ne supporteront pas de rester seuls. Ils exprimeront un fort sentiment d’abandon quand leur conjoint rentrera plus tard que prévu. Leur souffrance, tout-à-fait réelle, pourra les rendre agressifs, intolérants aux changements et les mener à développer un trouble panique ou anxieux, un épisode de dépression majeur, ou une toxicomanie. La prise en charge thérapeutique est recommandée pour alléger et adoucir leur détresse.